
Avec la musique, le chant est le mode d’expression des traditions le plus répandu dans toutes les nations. On chante son pays, son histoire, son quotidien, ses émotions dans toutes les langues et en de nombreuses occasions. Il est un des derniers vecteurs universels que les hommes partagent sans artifice. Qu’il soit entonné dans un petit village au fin fond de la Corse ou en vallée d’Aure, le chant est un hymne à son identité. Il s’inscrit dans une longue tradition qui se perpétue de génération en génération. Le chant pyrénéen, chant spontané, ne déroge pas à cette règle. Malgré ses particularismes, liés à l’usage d’une langue régionale ou du patois, il est ce lien indéfectible que l’on entretient avec son territoire.
Le chant pyrénéen, outil de préservation d’une culture
Le chant a contribué à la préservation d’une culture, d’une langue propre à un territoire. A partir du 15ème siècle, le français s’est progressivement imposé sur tout le territoire. Pendant longtemps, les langues régionales sont toutefois demeurées la langue du peuple. Aujourd’hui, ces langues continuent à être, bon an mal an, enseignées à l’école. On peut toutefois remarquer que si de nombreuses personnes ne parlent plus ni l’occitan ni le basque, ils continuent à le chanter. Les chants pyrénéens ont contribué à les faire vivre. Parce que ces chants, bien souvent entendus dans l’enfance, font partie d’un patrimoine affectif qui ne s’oublie jamais. Ils se transmettent de génération en génération. Le chant est d’ailleurs officiellement reconnu par l’UNESCO comme faisant partie du Patrimoine culturel immatériel depuis 2003.
Le chant pyrénéen , l’attachement à son territoire
Qu’ils soient basques, catalans, béarnais ou bigourdans, le chant est lié à un territoire. La montagne y est omniprésente. Lieu de vie des bergers, elle est source d’émerveillement, d’espoir, de joie, de solitude et de peine. On la chante pour déclarer sa flamme. On l’admire tout autant qu’on la redoute. Elle cristallise les émotions et constitue le socle de l’identité pyrénéenne. Le chant du « Berger d’Aure » est une invitation à randonner. Vers le Moudang, le Rioumajou, le Néouvielle, Bastan ou la Géla. Le chanter, c’est posé un doigt sur une carte et faire le tour de la vallée d’Aure.
Le chant pyrénéen, un témoignage de la vie passée
Les thèmes abordés dans les chants pyrénéens sont un témoignage d’une vie passée. En les écoutant, on y redécouvre la vie du berger et le quotidien des montagnards. La difficulté de vivre de cette terre. Les contraintes propres aux aléas du climat. Ces chants nous parlent de solidarité, d’amour, d’amitié et de partage. Ils expriment toujours cette fierté d’être montagnard. Ce déracinement qui consisterait à devoir quitter son « pays ». Cet émerveillement toujours renouvelé à admirer les paysages changer au gré des saisons. Ce plaisir de faire courir un isard ou d’écouter un tétras. Encore aujourd’hui, on ne conçoit pas une cérémonie, un repas ou une fête de village sans que ne résonnent des chants. C’est un bien commun qui, l’espace d’un instant, fait oublier les rancœurs et les différends.
- Les copains d’abord
- Le Mont Royal
- Les bérets bleus
- La chorale d’Aragnouet
Le chant pyrénéen, convivial et festif
Le chant pyrénéen tient désormais une place importante dans les différentes manifestations qui sont organisées dans les villages. L’Hesteyade de Bigorre , ce festival de chants pyrénéens dont la première édition remonte à 1978, a notamment incité de nombreux chanteurs à se fédérer dans des chorales. Qu’elles soient masculines, féminines, ou mixtes, elles connaissent un engouement populaire qui ne se dément pas. Que ce soient les chanteurs pyrénéens de Tarbes ou la chorale d’Aragnouet, le répertoire qu’ils interprètent séduit à la fois les habitants et les touristes. Le chant pyrénéen s’exporte désormais au-delà des vallées. Il est reconnu comme l’une des composantes de la culture pyrénéenne. Si Nadau a été un précurseur en termes de promotion des chants pyrénéens bien au-delà des Pyrénées, de nombreux autres groupes comme « A Vista de Nas » continuent à chanter cette culture.
Le chant pyrénéen, d’une tradition orale à une culture écrite
De tradition orale, le chant pyrénéen n’a commencé à faire l’objet d’études que tardivement. Au milieu du 19ème siècle, Eugène CORDIER l’évoque dans son projet pédagogique intitulé « Ethnologie des Pyrénées » que l’on peut consulter aux Archives Départementales des Pyrénées. Depuis, de nombreux auteurs se sont intéressés à son histoire. On peut notamment citer l’ouvrage de Pascal CHAUMONT, Gilbert PEYROT et Joan-Lois LAVIT intitulé « Le chant dans les Pyrénées » paru aux édition Piréna Immaterial-Jour des Arts. Certaines initiatives participent également à faire connaître ces chants à un plus large public. L’Office de Tourisme de Saint-Lary a récemment publié un livret qui en regroupe une cinquantaine. Le chant n’en a pas pour autant perdu ses racines. Les nombreux « mainats » qui se forment dans les villages en sont un témoignage vivant.